Chaque mois, nous valorisons les contributions de nos consultants. Aujourd’hui c’est une consultante experte des démarches d’amélioration de la qualité de vie et de la santé au travail qui nous parle de la capacité à (re)prendre du temps au travail.
Les exigences temporelles et notre rapport à l’instantanéité et à l’urgence sont-ils aujourd’hui des fatalités pour lesquelles il n’y a pas de marge de manœuvre possible ? Dans un contexte où tout va -ou doit aller- très vite, et si se donner du temps était paradoxalement un axe à découvrir ou à redécouvrir pour améliorer la QVT et la performance collective ? Et si se donner du temps permettait de se confronter à la complexité des situations de travail et aux multiples exigences internes et externes, et d’y faire face autant que possible ?
Repenser le temps à deux niveaux
Selon nous, ces questions méritent d’être posées et cela concomitamment à deux niveaux :
- au niveau de l’individu au travail : sur quoi peut-il agir et quelle pratique peut-il développer pour éventuellement gérer son temps autrement et améliorer la réalisation de son travail tout en développant son bien-être ?
- mais également au niveau du collectif et de l’organisation : comment donner (ou redonner) du temps dans l’organisation ?
Si des formations (planification, gestion du temps) permettent d’aborder le niveau individuel, nous centrerons aujourd’hui notre attention sur le niveau collectif et organisationnel.
Mais de quel temps parle-t-on ? Et, donner du temps dans l’organisation, pour quoi faire ? Quelques exemples très concrets exprimés par des salariés, des agents ou des managers de tout niveau hiérarchique et de tout type de structure apportent quelques éléments de réponse à ce questions.
Donner du temps lors de différents temps organisationnels
Il nous paraît utile de démarrer par un exemple qui apparaît comme plein de bon sens et que l’on retrouve dans tout type d’organisation : la réunion. De manière pragmatique, les professionnels expriment le besoin de bénéficier de temps lors des réunions, en réduisant tout simplement par exemple les ordres du jour, pour pouvoir se parler et faire émerger des constructions collectives. Cela ne veut pas dire se donner du temps pour parler de tout mais de donner la marge temporelle nécessaire pour se parler et construire ensemble.
Cela se concrétise également par du temps disponible et officialisé pour échanger sur le travail. Par exemple au sein des équipes de soins mais également chez les équipes postées dans l’industrie, s’exprime un besoin de déployer des temps adaptés et prévus dans l’organisation pour pouvoir se transmettre des consignes, se coordonner, réfléchir et se mettre d’accord sur des actions etc.
De plus, lorsqu’il est demandé aux professionnels d’innover et de développer des nouvelles pratiques, cela passe nécessairement par des temps d’échanges. Pour créer il faut du temps.
Cela rejoint un autre exemple largement exprimé par les professionnels lors de nos interventions : il s’agit du temps de préparation des changements (en amont) et du temps de bilan. Ces temps trop souvent négligés à l’heure actuelle, permettent pourtant la remontée et la prise en compte des besoins et des avis des professionnels quant aux impacts sur le travail et aux actions utiles pour supprimer les irritants mais également pour favoriser l’appropriation des changements, préserver la santé au travail et s’assurer de la bonne réalisation des activités in fine.
De même, les temps de bilan sur le travail à réaliser ne sont pas à oublier : prendre le temps d’identifier ce qui a fonctionné ou non (et pourquoi) permet de veiller à l’amélioration continue et finalement d’éviter de changer de cap en permanence (sous prétexte que cela ne fonctionne pas donc qu’il faille tout changer).
Enfin un dernier exemple : donner le temps des échanges entre pairs mais également de manière transverse, entre les professionnels de différentes fonctions ou services au sein d’une même organisation. Prendre le temps de connaître ce que fait l’autre est un levier fort pour comprendre les logiques souvent divergentes entre professionnels, de comprendre les contraintes de l’autre, ses pratiques et de faciliter les ajustements et les régulations collectives.
Pour conclure
Il ne s’agit pas, à travers ces exemples, de dire qu’il est nécessaire de multiplier les temps. L’enjeu est surtout de les officialiser dans l’organisation, de les prévoir et de s’assurer que ces temps répondent à des besoins concrets pour pouvoir mieux travailler.
Donner ces temps ne va également pas tout résoudre. D’autres leviers sont à intégrer. Mais nous constatons trop souvent des intentions de favoriser, par exemple, les échanges sur le travail, sans pour autant donner le temps nécessaire pour le faire pleinement. Somme toute, donner le temps repose avant tout sur une volonté stratégique et un engagement réel. Cela repose également sur des priorisations voire des renoncements pour laisser la place à ces temps.
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