Constats et enjeux du dialogue social
En juin 2018, le Centre de recherches politiques de Sciences Po (CEVIPOF) a publié les chiffres du baromètre du dialogue social en France. Il a mis en évidence que seuls 21% des salariés sondés estiment qu’il existe un dialogue social efficace au sein de leur organisation. Aussi, 47% expriment ne pas avoir confiance envers leur direction. Pourtant, 52% des salariés pensent que la négociation en entreprise est à privilégier par rapport aux actions de l’état et du code du travail et aux négociations au niveau des branches.
Les études scientifiques sont formelles à propos de l’impact humain de la qualité du dialogue social : elle représente un puissant prédicteur de la confiance envers la direction, de la satisfaction au travail et de l’engagement des salariés, mais aussi de la performance individuelle et organisationnelle quant à la productivité, la qualité des biens et des services, l’innovation et la réduction de l’absentéisme (Newman & al., 2018 ; Snape & Redman, 2012).
La qualité du dialogue social joue donc un rôle majeur dans l’expérience de travail des salariés ainsi qu’en faveur de la performance durable des organisations.
Promouvoir la qualité du dialogue social
Selon l’Organisation Internationale du Travail, « Le dialogue social inclut tous types de négociation, de consultation ou simplement d’échange d’informations entre les représentants des gouvernements, des employeurs et des travailleurs selon des modalités diverses, sur des questions relatives à la politique économique et sociale présentant un intérêt commun ». Aussi, « L’objectif principal du dialogue social en tant que tel est d’encourager la formation d’un consensus entre les principaux acteurs du monde du travail ainsi que leur participation démocratique ». Autrement dit, il s’agit d’un précieux moyen de protéger et de promouvoir les intérêts des travailleurs en élargissant la démocratie et la dignité humaine au lieu de travail.
Le dialogue social est sous-tendu par la qualité des relations professionnelles, définies comme la mesure dans laquelle les salariés perçoivent l’interaction entre la direction et les Instances Représentatives du Personnel comme une relation de coopération, de respect et de confiance (Deery & al., 2014). Ainsi, les négociations collectives doivent être menées dans la reconnaissance et le respect des objectifs de chacune des parties et avec un désir sincère d’obtenir des résultats.
Cela sous-entend que les partenaires sociaux doivent agir au-delà de tout cynisme ou jeu de postures, dans la recherche de l’intérêt collectif. Il ne s’agit pas de s’accorder sur tout pour autant. Les instances de dialogue social restent un lieu de confrontation. Mais lorsque cette dernière est constructive et sous-tendue par de réels degrés de liberté à la disposition des négociateurs, elle aboutit en général à des résultats positifs.
Un dialogue social de qualité permet notamment l’identification d’objectifs communs, la transparence des décisions et la perception de justice organisationnelle en matière distribution des ressources financières, informationnelles, etc. (Kougiannou & al., 2015).
Le dialogue social en pratique
L’importance que l’organisation manifeste envers la qualité du dialogue social peut prendre corps au travers d’un processus de négociation solide et bien organisé, comportant l’existence de finalités contraignantes et permettant l’acceptation et la réalisation effective des objectifs collectifs par tous. L’efficacité du processus de dialogue social gagnera par ailleurs à être régulièrement évaluée de façon paritaire et au prisme d’indicateurs choisis conjointement par les partenaires sociaux.
Les situations de changements organisationnels représentent l’exemple parfait de l’importance du dialogue social dans l’organisation. Une conduite du changement efficace passe ainsi par une réelle concertation préalable afin d’anticiper conjointement les conséquences d’une transformation, puis par un processus de suivi des impacts qui pourra donner lieu à des actions correctives décidées dans la concertation.
Auteur
Julia Aubouin Bonnaventure, chargée de recherche appliquée chez AD Conseil et doctorante en convention CIFRE en psychologie du travail et des organisations au laboratoire Qualipsy de l’Université de Tours. Ses travaux portent sur l’étude des effets des pratiques organisationnelles sur la santé psychologique, les attitudes et les comportements des travailleurs.
Bibliographie
Deery, S. J., Iverson, R. D., Buttigieg, D. M., & Zatzick, C. D. (2014). Can Union Voice Make a Difference? The Effect of Union Citizenship Behavior on Employee Absence. Human Resource Management, 53(2), 211‑228. https://doi.org/10.1002/hrm.21549
Kougiannou, K., Redman, T., & Dietz, G. (2015). The outcomes of works councils : The role of trust, justice and industrial relations climate. Human resource management journal, 25(4), 458–477. https://doi.org/10.1111/1748-8583.12075
Newman, A., Cooper, B., Holland, P., Miao, Q., & Teicher, J. (2018). How do industrial relations climate and union instrumentality enhance employee performance? The mediating effects of perceived job security and trust in management. Human Resource Management, 58(1), 35‑44. https://doi.org/10.1002/hrm.21921
Snape, E., & Redman, T. (2012). Industrial Relations Climate and Union Commitment : An Evaluation of Workplace-Level Effects. Industrial Relations: A Journal of Economy and Society, 51(1), 11‑28. https://doi.org/10.1111/j.1468-232X.2011.00662.x
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