Conduire le changement (2/2) : Répondre aux préoccupations

27 Juil, 2018

Une étude récente conduite pour évaluer l’efficience d’un panel de 1 500 projets de transformations organisationnelles a démontré que plus de 70 % n’arrivaient pas à atteindre la totalité de leurs objectifs[1].  Lorsqu’ils ont été questionnés sur les raisons de ces échecs partiels ou totaux, les pilotes de ces projets ont pointé le facteur humain comme la première cause d’échec.

Cet exemple illustre parfaitement le caractère essentiel de l’appropriation du changement par ses destinataires. Il nous rappelle pourquoi le changement organisationnel est systématiquement associé au terme de « résistance ».

Ce terme est employé de façon générique pour décrire l’ensemble des comportements observés au sein d’un collectif de travail soumis à une prescription de transformation.

Il est pourtant légitime de se demander pourquoi l’adhésion au changement, certes recherchée, devrait couler de source.

L’expérience démontre qu’il est déjà extrêmement compliqué pour chaque individu d’adopter de nouvelles habitudes de façon durable, même lorsqu’elles sont totalement volontaires et souhaitées. Que dire donc de changements imposés, contraignant parfois brutalement à de nouvelles habitudes de travail ?

Plusieurs approches théoriques se sont ainsi intéressées aux leviers de l’adhésion au changement. Parmi ces dernières, la théorie dite des phases de préoccupation de Bareil et Savoie[2] fait partie des modèles dont l’assise scientifique permet de disposer d’une grille de lecture fiable pour comprendre ce qui anime les individus en situation de changement organisationnel et tenter de dépasser les freins.

Le modèle des sept phases de préoccupation :

Le modèle des phases de préoccupation montre qu’un individu soumis à un contexte de changement passera successivement par les sept stades de préoccupation suivants :

Focus QVT – Phases de préoccupation

Trois enseignements majeurs découlent de cette grille de lecture :

  1. Lors de l’initiation de changements organisationnels, la communication institutionnelle est la plupart du temps centrée sur les finalités et l’intérêt collectif des projets. Or, les individus ne se sentent pas concernés par cette dimension collective dans un premier temps. Ils sont au contraire autocentrés sur leur propre situation et ne s’ouvrent à la transformation que lorsqu’ils sont rassurés sur leur propre devenir.
  2. La troisième phase est particulièrement intéressante. Elle met en évidence les comportements au travers desquels les individus vont sciemment « tester » la volonté de transformation de l’organisation pour en éprouver le sérieux. C’est lors de cette phase qu’il est particulièrement recommandé aux pilotes des transformation d’être déterminés afin de démontrer la volonté institutionnelle de mener les changements à leur terme.
  3. Les comportements de résistance ne s’estompent que lorsque que chaque acteur a obtenu des réponses satisfaisantes à l’ensemble de ses préoccupations individuelles. Cela est tout à fait logique : il y aurait en effet peu d’intérêt à s’investir dans un projet allant à l’encontre de ses propres intérêts.

Cela met en évidence l’intérêt de personnaliser la communication dès l’initiation des projets, en donnant tant que faire se peut de la visibilité à chaque acteur sur son devenir au sein de l’organisation.

Adapter la communication en situation de changement au regard des phases de préoccupation

Le modèle de Bareil et Savoie permet de construire une communication efficiente en situation de changement, en apportant des réponses précises à chaque phase de préoccupation :

Une réponse satisfaisante aux préoccupations passe par une préparation rigoureuse des transformations. La phase d’analyse de l’aire du changement et d’identification des zones de rupture est à ce titre essentielle, dans la mesure où elle fournit le matériau nécessaire pour enrichir la communication et construire les mesures d’accompagnement de la transition.

Conclusion

Croire que le fait de démontrer l’intérêt collectif d’un changement organisationnel suffira à susciter l’adhésion revient à pêcher par optimisme.

L’adhésion au changement organisationnel passe dans un premier temps par une réponse satisfaisante aux préoccupations de chaque acteur. C’est seulement une fois que ces questionnements individuels ont fait l’objet de réponses rassurantes que le volet collectif et constructif de la transformation peut s’engager.

Pour aller plus loin : La chercheuse Céline BAREIL a développé une méthodologie de diagnostic fondée sur le modèle de préoccupation. En savoir plus ici.

[1] Mc Kinsey, 2009

[2] Céline BAREIL et André SAVOIE, HEC Montréal, 1999

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