L’EHPAD les Buissonnets (110 résidents et 80 salariés) est situé à Béceleuf, à proximité de Niort. Il accueille des personnes âgées en situation de perte d’autonomie ou de dépendance et propose un accompagnement spécifique pour les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer ou d’une maladie apparentée grâce à une unité dédiée. En partenariat avec l’OPCO Santé et AD Conseil, l’établissement a progressivement mis en place depuis plusieurs mois une démarche participative et intégrée d’amélioration continue de la QVT.
Françoise Laboirie-Ladner est la Directrice de cet établissement et a accepté de partager avec nous son expérience.
Pouvez-vous nous présenter le contexte dans lequel vous avez entrepris cette démarche QVT ? A quels enjeux tentait-elle de répondre et quels objectifs recherchiez-vous ?
F.Laboirie-Ladner : Je suis arrivée à la direction de l’établissement en 2 temps. Tout d’abord une première période de décembre 2018 à mars 2019 où j’étais à mi-temps (étant toujours en poste sur un autre établissement) puis un 2ème temps à partir d’avril 2019 où je suis à temps plein. Dès la 1ère semaine de mon arrivée en décembre, j’ai eu dans mon bureau le Médecin du Travail, puis l’Inspection du Travail. Tous deux venaient m’informer du mal-être général des salariés lié aux carences managériales. Très rapidement j’ai décidé de rencontrer chaque salariés et ces entretiens ont confirmé la souffrance morale de l’équipe et l’immensité de leurs attentes.
Ma première décision a été de diriger cet établissement de manière collégiale en créant un comité de direction. Celui-ci allait par la suite être constitué de 5 personnes ; toutes ayant en responsabilité une équipe. Ceux que j’ai nommé « Responsable de pôle » allaient devenir l’interface entre la direction et les équipes de soin, d’hotellerie, de cuisine, de maintenance et d’administration.
Pour moi l’enjeu est de faire progresser et de fidéliser les personnels avec une orientation stratégique majeure que je résumerais ainsi : Permettre au personnel de s’épanouir, au niveau professionnel, du fait d’une organisation prenant en compte la qualité de vie au travail.
Pour cela il était nécessaire et indispensable que le comité de direction ait une culture commune et maîtrise les mêmes concepts sur la QVT.
Très vite, nous nous sommes aperçus que si personne au sein du comité de direction ne prenait la responsabilité du travail intersession à mener, nous allions rapidement stagner
Pouvez-vous nous expliquer le principe d’une démarche QVT intégrée ? Comment vous êtes-vous structurés afin de porter cette démarche en interne ?
F.Laboirie-Ladner : Nous avons eu la chance de vivre cette formation/action au sein de l’établissement, à nous 6. Une fois les bases lancées et le vocabulaire commun acquis, nous nous sommes très vite mis au travail en faisant le lien entre la particularité de notre situation et ce que nous étions en train d’apprendre sur le concept de QVT. Entre chaque session, le comité de direction se réunissait pour transposer les acquis théoriques à ce que nous visions en termes d’objectifs managériaux.
Pourtant, très vite, nous nous sommes aperçus que si personne au sein du comité de direction ne prenait la responsabilité du travail intersession à mener, nous allions rapidement stagner, encombrés que nous étions tous dans le quotidien de nos fonctions.
Notre productivité en matière de QVT s’est nettement améliorée.
Je suis en fin de carrière et c’est pour moi une première que de diriger l’établissement de manière collégiale et de conceptualiser la Qualité de Vie au Travail pour me permettre de l’intégrer à nos pratiques.
Par quelles étapes successives avez-vous cheminé pour évaluer et améliorer la QVT au sein de votre établissement, et comment les salariés ont-ils été associés ?
F.Laboirie-Ladner : En amont de la formation, au cours d’une réunion de tout le personnel, il a été expliqué aux salariés le constat fait en matière de QVT ainsi que les objectifs qui motivaient notre départ en formation. Il nous a semblé impératif, avant d’associer davantage les salariés, de bien maîtriser le sujet. C’est pourquoi nous avons créé un Comité Qualité de Vie au Travail, constitué dans un premier temps des membres du comité de Direction. Nous avons d’abord écrit la lettre de mission des membres du Comité QVT puis rédigé la charte de ce même comité. A terme, cette lettre de mission sera associée au profil de poste des responsables de pôles. Ensuite nous avons rencontré les salariés afin de les auditer sur la QVT à partir d’un outil écrit et codifié, proposé par la formatrice. Ces temps d’échanges étaient menés et animés par un responsable de pôle et notre référente QVT au sein du Comité de direction. Le responsable de pôle était en situation d’animation avec des salariés qui n’étaient pas ceux qu’il gérait au quotidien. A l’issu de ces temps d’échanges, les résultats étaient transmis en direct aux salariés.
A compter de septembre 2020 nous poursuivons notre démarche en incluant dans le profil de poste des responsables de pôle le concept de QVT et en associant les salariés, notamment par des représentants.
A compter de septembre 2020 nous poursuivons notre démarche en incluant dans le profil de poste des responsables de pôle le concept de QVT et en associant les salariés, notamment par des représentants.
Quel regard portez-vous sur la démarche QVT un an après son lancement ?
F.Laboirie-Ladner : Je suis en fin de carrière et c’est pour moi une première que de diriger l’établissement de manière collégiale et de conceptualiser la Qualité de Vie au Travail pour me permettre de l’intégrer à nos pratiques. Je l’ai voulu ainsi ! Certains diront que j’ai le goût du risque d’autres au contraire penserons qu’il est toujours temps !
Cela nous a permis de mettre des mots, de voir aboutir des concepts, d’affiner nos analyses et d’intégrer le fait que le travail peut contribuer au bien-être et qu’à ce titre nous, femmes et hommes de management, nous avons une responsabilité forte.
Nous avons atteint les objectifs que nous nous étions fixés pour la formation et sommes conscients des points de vigilance qu’il nous faut avoir comme par exemple celui de ne pas se faire absorber dans un quotidien chronophage en gardant à l’esprit qu’un salarié qui va bien dans son travail peut devenir un salarié heureux.
Quel(s) conseil(s) souhaiteriez-vous donner aux EHPAD ou autres établissements du secteur sanitaire, social et médico-social qui souhaitent travailler durablement sur l’amélioration de la QVT ?
F.Laboirie-Ladner : Je ne souhaite pas donner de conseils mais simplement faire part d’une expérience dont chacun peut se nourrir à sa guise.
S’engager dans une démarche QVT est une course de fond et les résultats se mesurent à long terme.
Sur la durée, il me semble nécessaire de conserver un point de vigilance pour que cette réalité de la QVT ne soit pas remisée au placard.
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