La disposition collective au changement comme levier de compréhension et d’amélioration
Il y a quelques semaines, nous avons détaillé dans un premier article les leviers favorisant la disposition individuelle au changement.
Dans la suite de notre série sur la préparation du changement, nous vous proposons aujourd’hui de détailler les leviers favorisant la disposition collective au changement.
Qu’est-ce qui détermine la disposition collective au changement ?
L’intérêt pour la disposition collective au changement vient du fait que souvent, les membres qui composent une organisation ne sont pas isolés. Ils sont interdépendants dans le sens où chacun dépend partiellement de l’autre. Cela implique que toute action ou décision individuelle a une influence collective.
Ainsi, l’implémentation d’un changement organisationnel complexe devient une construction collective portée par de nombreuses personnes qui contribuent chacune à l’effort dans une idée de travail d’équipe. Dès lors, la seule appréhension de la disposition individuelle ne suffit pas à rendre compte de la complexité des processus qui sont en jeu au sein d’une organisation lorsque celle-ci souhaite mettre en œuvre un changement.
La disposition collective au changement correspond à la mesure dans laquelle les personnes concernées par le changement sont collectivement préparées, motivées et techniquement capables de l’exécuter. Comme au niveau individuel, elle est sous-tendue par des facteurs structurels et psychologiques qui reflètent le degré auquel l’organisation est encline à accepter, adopter et mettre en œuvre le changement.
Les facteurs structurels :
Dans leur étude de 2010, Holt et ses collaborateurs, abordent les circonstances dans lesquelles se met en œuvre le changement. Ils mettent ainsi en évidence trois conditions structurelles plus ou moins favorables au succès d’un changement organisationnel :
1/ La mise en place de stratégies facilitant la mise en œuvre du projet. Ainsi, il convient de réaliser un plan de mise en œuvre détaillé et partagé, définissant les buts du changement, les objectifs à atteindre, les rôles de chacun et le système de mesure des progrès.
2/ La compréhension partagée qu’il existe un écart entre la situation, les pratiques ou encore les résultats actuels et d’autres plus désirables vers lesquels l’organisation souhaite tendre est également favorable de succès du projet
3/ La présence d’un climat soutenant l’implémentation du projet. Ce climat se caractérise par des éléments plus ou moins tangibles, comme la présence de ressources suffisantes ou la culture organisationnelle.
Les facteurs psychologiques :
Outre les conditions structurelles, deux indicateurs psychologiques permettent de témoigner de la plus ou moins grande disposition collective à changer. Ces indicateurs psychologiques correspondent aux attitudes, croyances et ressentis collectifs à l’égard du changement.
1/ L’engagement collectif renvoie à une résolution partagée, collective, de poursuivre les actions nécessaires pour mener à bien ce projet. L’engagement est conditionné par la valeur qui est accordée au changement. Cependant, peu importe les raisons pour lesquelles chacun le valorise, l’essentiel est que les membres de l’organisation apprécient suffisamment ce changement de manière collective pour s’engager dans sa mise en œuvre.
Favoriser l’engagement collectif nécessite de susciter la valorisation du changement chez les membres, qui s’engageront alors dans le changement car « ils le veulent ». Cette volonté traduit le plus haut niveau d’engagement, comparativement à d’autres formes. Ainsi, une grande pédagogie doit être déployée pour passer du sentiment d’obligation ou de nécessité à la volonté de changer.
Cette volonté peut être encouragée par, premièrement, une transparence, une clarté et une homogénéité dans la présentation des raisons justifiant ce changement. Et deuxièmement, par une co-construction du sens, des finalités et des actions relatives à ce changement. Il n’est pas ici question de nier la décision et le pilotage politique et stratégique du changement, mais plutôt de permettre à chacun, dans sa définition opérationnelle, d’en être un véritable acteur en se l’appropriant au travers d’espaces d’échanges et de concertations et de retours réguliers sur les avancées.
2/ L’efficacité collective renvoie quant à elle à la croyance partagée des membres de l’organisation en leur capacité collective à organiser et réaliser la suite d’actions nécessaires à la mise en œuvre du changement.
L’efficacité collective est appréciée selon la perception des membres de leur propre connaissance des actions requises, de la disponibilité des ressources nécessaires et enfin, de la situation. Ce dernier point fait référence par exemple au temps accordé pour la mise en œuvre : est-il suffisant ? Ou encore à l’environnement politique interne. Dans le cadre spécifique d’une démarche d’amélioration de la qualité de vie au travail (qui constitue un changement des pratiques impactant la QVT a minima), l’environnement politique interne peut renvoyer au climat de sécurité psychosociale plusieurs articles ont déjà été dédiés.
De plus, pour favoriser l’efficacité collective, le séquençage du projet doit permettre, dans sa traduction opérationnelle, de fixer à chaque groupe d’acteurs des objectifs stimulants pour la réalisation du projet, tout en laissant la main aux managers de proximité dans le choix de l’intensité de l’émulation au regard du sentiment de capacité du groupe, afin de ne pas le mettre en difficulté.
Comment favoriser la disposition collective au changement ?
En plus des leviers précédemment cités, il est essentiel de souligner que la particularité de la disposition collective au changement réside dans le fait qu’elle doit être communément partagée. Sans quoi des difficultés peuvent survenir dans lors des tentatives de coordination des actions menées indépendamment par chaque acteur.
Deux bonnes pratiques favorisent une perception homogène du changement :
La transmission d’actions et de messages cohérents, constants et fiables en provenance du top management (gouvernance) d’une part, et, d’autre part,
le partage d’informations et d’expériences au travers des interactions sociales entre les différents services ou équipes qui composent l’organisation, dans une logique de communication transversale.
Ces deux axes permettent d’établir et de maintenir des perceptions communes et homogènes de la disposition collective à changer.
En s’intéressant à la préparation au changement, la recherche scientifique nous rappelle donc que l’implémentation d’une nouvelle organisation est le fruit d’un long processus jalonné d’étapes. Elle souligne également l’importance de l’effort collectif, à l’image d’un travail d’équipe, nécessaire à toute réussite collective.
Quelques références :
- Holt et al. (2010)
- Shea et al. (2014)
- Weiner (2009)
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