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Comme le précise l’Accord National Interprofessionnel de 2013, « la Qualité de Vie au Travail désigne et regroupe sous un même intitulé les actions qui permettent de concilier à la fois l’amélioration des conditions de travail pour les salariés et la performance globale des entreprises »1. Parmi ces actions, un grand nombre ont vocation à être pilotées par les services des ressources humaines. C’est par exemple le cas des actions concernant l’employabilité et le développement des collaborateurs, de celles qui ont trait au dialogue social, ou encore, des actions relatives à l’organisation du travail. Cette vastitude offerte par le champ de la QVT laisse aux organisations l’opportunité d’appréhender cette thématique sous de nombreux angles.
Néanmoins il va de soi que cela requiert un niveau minimal de connaissances et de compétences qui reposent en partie sur les formations initiales dispensées aux acteurs RH et, en conséquence, sur les choix pédagogiques des organismes qui les dispensent.
De nos jours, de nombreux parcours permettent d’accéder à la fonction RH : formations initiales en droit, en gestion, en sciences sociales, au sein d’universités, d’instituts ou d’écoles de commerces privées … D’après Studyrama, pas moins de 735 formations en France permettent aujourd’hui de devenir un acteur RH.
Cette diversité de formations soulève plusieurs questions : est-ce que la thématique de la QVT y est abordée de la même façon ? L’est-elle suffisamment ? Quelles devraient être les connaissances minimales à avoir sur cette thématique ? Et est-ce que les acteurs RH se sentent suffisamment armés une fois en poste ?
Pour répondre à ces questions, nous avons décidé de recueillir l’avis de professionnels RH. Aujourd’hui, nous partageons la vision d’Agathe, responsable des ressources humaines dans un établissement industriel de fabrication de cartonnages de 200 salariés.
Le blog QVT : Que représente pour vous la qualité de vie au travail ?
Agathe : J’occupe actuellement un poste de responsable RH dans une industrie d’environ 200 salariés. J’ai un lien direct avec la QVT car je pense qu’elle passe en grande partie par le biais de la fonction RH et que nous nous devons de l’impulser. L’employeur et la fonction RH sont garants du bien-être des salariés. Aujourd’hui nous la mettons en œuvre dans un premier temps au travers des obligations de négociations sur plusieurs sujets (seniors, diversité, pénibilité, égalité professionnelle homme/femme …) et au travers de la transformation des conditions d’emploi et de travail (organisation, outils, restructurations …). Il y a aussi une réelle prise de conscience du lien existant entre performance économique et bien-être au travail.
Le blog QVT : Au cours de vos études, qu’avez-vous appris sur la QVT ?
Agathe : Au cours de mes études j’ai abordé cette thématique par le biais des obligations de négociations mais nous avons aussi abordé la QVT au travers du reportage « Le Bonheur au Travail » d’Arte.
Nous avons surtout échangé autour de ce reportage qui met en avant des exemples d’entreprises qui se veulent innovantes au travers de la recherche des dirigeants d’allier bien-être et performance. Ce que je retiens de ces cours c’est que l’employeur a tout intérêt à prendre en compte la QVT au sein de son entreprise afin de fidéliser les salariés et d’éviter le turnover.
Le blog QVT : Une fois en poste, comment avez-vous pu utiliser ce que vous aviez appris sur la QVT ?
Agathe : J’ai effectué l’ensemble de mes études en alternance, ce qui m’a permis de découvrir différents types d’entreprises et surtout différentes approches. Je ne peux pas vraiment dire que j’ai utilisé en entreprise ce que j’ai appris en cours mais plutôt que j’ai découvert d’autres aspects de la QVT.
Dans certaines de mes expériences en alternance, les entreprises avaient la volonté d’aller au-delà de ces obligations. J’ai par exemple travaillé sur un projet de salle de sport au sein d’une entreprise. J’ai également travaillé, lors de mon alternance, dans un groupe qui mettait en place tous les trimestres une semaine sur un thème spécifique comme l’environnement, la sécurité, les troubles liés aux DYS (dyslexie, dysorthographie), etc. Ces semaines à thèmes s’inscrivaient dans une approche de QVT : c’était un moyen de mélanger l’ensemble des salariés de l’entreprise au travers de petites activités. Cela permettait de les faire sortir de leur quotidien, et aussi de faire témoigner certains salariés lorsqu’ils étaient en lien avec le sujet et donc de les découvrir sous un autre angle.
Le blog QVT : Avec du recul, pensez-vous avoir manqué de certains éléments ? De quoi auriez-vous eu besoin ou de quoi avez-vous besoin aujourd’hui encore pour œuvrer avec plus d’efficacité à améliorer la QVT ?
Agathe : J’ai forcement manqué de certains éléments car le module relatif à la QVT dans mes études n’était pas vraiment conséquent. De plus, c’est une notion récente à propos de laquelle nous avons encore beaucoup à apprendre. La QVT doit s’adapter également à la culture de l’entreprise et surtout à la population de l’entreprise.
Clairement à ce jour ce dont je manque vraiment pour améliorer la QVT, c’est de temps pour établir un diagnostic et le décliner en actions ciblées.
Mais bien évidement en tant que professionnelle RH c’est un domaine auquel je suis sensible et que nous nous devons de développer et de préserver avec la direction. Nous avons à ce titre initié plusieurs actions significatives en organisant des entretiens permettant d’assurer un équilibre vie privée/vie professionnelle et en instaurant le télétravail. Nous garantissons également, au sein de l’entreprise et lors des recrutements, une diversité et de la non-discrimination, et nous veillons à ce qu’il y ait un climat social constructif. Enfin, nous offrons des perspectives d’évolutions. Mais il y aurait tellement d’autres belles choses à faire pour allier bien-être au travail et performance, qui, in fine, sont la clef d’une entreprise efficace et efficiente.
L’avis du blog QVT
Le témoignage d’Agathe soulève plusieurs éléments :
- Premièrement, les organismes dispensant des formations aux futurs RH semblent avoir fait un premier pas vers la notion de QVT et semblent notamment essayer de faire prendre conscience aux futurs RH de l’importance de mettre en place des pratiques contribuant à la QVT, particulièrement pour favoriser la fidélité des collaborateurs et limiter le turn-over. Toutefois, cet enseignement de la QVT peut encore s’avérer succinct, notamment parce l’argumentaire qui y est associé semble s’articuler majoritairement autour de la productivité de l’entreprise. Agathe nous précise d’ailleurs que cette thématique avait été abordée, dans sa formation, par le biais des obligations de négociation. L’argumentaire des enseignements mériterait d’être étoffé, et de s’appuyer, non seulement sur les gains en termes de productivité pour les entreprises, mais aussi sur les gains en termes de santé – au sens élargi porté par l’OMS – chez les individus.
- Deuxièmement, la notion de QVT semble plus claire dès lors qu’elle est mise en application : en effet, Agathe précise que ses diverses expériences en alternance lui ont permis d’appréhender différents aspects de la QVT en fonction des objectifs et des structures dans lesquelles elle évoluait. Ainsi, cela permet de souligner le fait que la compétence QVT ne peut être transmise uniquement sous son angle académique mais qu’elle doit aussi s’acquérir à travers la mise en pratique sur le terrain dès lors que cela est possible, et par la proposition, par exemple, de cas pratique ou de témoignages de professionnels.
Source :
1Accord National Interprofessionnel du 19 juin 2013 – Vers une politique d’amélioration de la qualité de vie au travail et de l’égalité professionnelle
L’auteure
Alexia Saunier est psychologue du travail et des organisations. Elle intervient auprès d’organisation privées et publiques et les accompagne dans le développement de leur politique de qualité de vie au travail.
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